« Je suis AESH. J’aime beaucoup ce que je fais. Je suis dévouée et investie dans ce rôle. Je n’aborderai volontairement pas les sujets d’agacement (rémunération, reconnaissance, évolution de carrière,…) mais relèverai simplement la richesse et la profondeur de cette fonction. Accompagner des élèves en situation de handicap n’est pas uniquement une expérience enrichissante et formatrice. Pour moi, c’est un défi. Il s’agit de tout mettre en œuvre pour que « l’élève en situation de handicap » devienne davantage « élève » que « porteur de handicap ». Dans cet exercice, je peux, modestement, me sentir utile ; et me réjouir d’avoir un rôle à jouer, si petit soit-il, dans la réussite de l’élève. J’aime vraiment ce que je fais.
Je suis maman aussi. Mon fils est atteint d’autisme à un degré sévère. Il a effectué ses trois années à l’école maternelle avec une AVS-i, puis fréquenté l’école élémentaire, au sein de l’Ulis, toujours avec une AVS-i. Cet accompagnement humain était essentiel pour lui, nécessaire pour les professeurs, indispensable à sa scolarisation en milieu ordinaire. L’épanouissement de mon fils, sur lequel repose tout l’équilibre familial, dépendait en grande partie d’une seule personne : l’AVS.
Après ces quelques précisions, vous serez sans doute plus à même de comprendre mon indignation.
Suite à des problèmes de santé, j’ai été en arrêt maladie tout au long de cette année scolaire. Faute de moyens, je n’ai pas été remplacée. Actuellement, je doute (considérant les observations de mon chirurgien) que mon état me permette de reprendre en septembre. Le cas échéant, je n’ai aucune idée de la durée de ma convalescence. Cependant, je dois faire part de ma décision de poursuivre ou non ma mission au sein de l’établissement. Cette situation mérite qu’on s’y attarde. Parce qu’elle est déplorable et consternante. Elle impose de faire un choix cornélien : malgré mon arrêt maladie, je reste en poste d’Accompagnant au détriment de l’Accompagnement, ou, je quitte le poste d’Accompagnant en faveur de l’Accompagnement ? Quelque chose sonne faux…Quelle aberration !
Ma personnalité et mon vécu personnel font que je ne pourrai pas supporter que mon absence soit à l’origine de dysfonctionnements au sein de l’Ulis, ou d’un manque d’accompagnement des élèves qui en ont besoin. Ma conscience m’interdit de m’engager au risque d’une absence qui serait préjudiciable aux élèves.
Au vu de ces considérations, compte tenu du manque de ressources et en l’absence de solutions alternatives, je suis contrainte, avec beaucoup de regrets, de vous présenter ma démission.
Je constate avec tristesse (mais sans surprise) que les manquements en termes d’accompagnement du handicap sont aussi flagrants du côté des personnes nécessiteuses que du côté des professionnels. Je sais hélas que ma décision et ces quelques mots ne peuvent rivaliser avec la « logique institutionnelle ». Néanmoins mes convictions m’empêchent de m’y conformer. »