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L’Abédécaire pédagogique du SNALC Spécial JO

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© pikisuperstar

 Pour ce deuxième numéro de l’APEP2S, un spécial Jeux Olympiques d’été.100 ans : voilà le temps qu’il a fallu attendre pour voir les JO s’inviter à nouveau dans notre capitale. Les enseignants sont naturellement concernés par cet événement. Cet abécédaire énumère quelques faits et réflexions à travers l’histoire des jeux. Parce qu’il est aussi un « passeur culturel » (J-M Zakhartchouk, 1999), ces 26 articles offrent des occasions pour échanger avec les élèves sur cet événement planétaire. Bonne lecture

ARTS

« Mens sana in corpore sano » : cette célèbre expression du poète romain JUVENAL traduit une des préoccupations du baron français Pierre de COUBERTIN :« Un esprit sain dans un corps sain ». Ce rénovateur des jeux olympiques des temps modernes est président du Comité Internationale Olympique de 1896 à 1922. Il rêve d’un athlète (masculin) complet, c’est-à-dire aussi bien physiquement qu’intellectuellement. Pour atteindre cet idéal, il propose, en plus des compétitions sportives, des concours d’arts. De 1912 à 1948, le Pentathlon des Muses a ainsi toute sa place à côté des autres sports. Il s’agit de 5 épreuves artistiques d’architecture, depeinture, de sculpture, de littérature et de musique sur des thèmes en lien avec le sport ou l’olympisme.

Peu d’engouement au démarrage pour cette formule artistique. Les artistes professionnels n’ayant pas le droit de concourir, les participants n’ont pas l’aura internationale pour attirer les projecteurs. Le rapport sur le bilan des Jeux de Londres de 1948 au CIO est sans appel. Il qualifie le niveau général des productions de « médiocre » et dénonce le professionnalisme caché de nombreux participants. C’est la fin de ces épreuves artistiques.

Pourrions-nous assister un jour prochain, à la réintroduction de ce type de compétition ? Avec notamment de nouvelles familles d’épreuves comme la photographie, le théâtre ou tout ce que l’art nous autorise à imaginer. Et si nos Jeux modernes s’offusquent de cette audace, pourquoi ne pas envisager des Jeux des Arts à part entière ?

BOYCOTT

Lors des JO d’Athènes de 2004, le Judoka iranien Arash MIREISMAEILI, double champion du monde en titre de sa catégorie (-66 kg)et favori logique de ces jeux, se présente à la pesée avec 5,5 kg de trop ! Il est donc disqualifié dès le premier tour. Voilà ce qu’il déclarera plus tard :« Je me suis entraîné pendant des mois, je suis en forme, mais je refuse de combattre contre un israélien, par sympathie pour les souffrances du peuple palestinien, et cette élimination ne me bouleverse pas ». Cette prise de poids est donc volontaire pour éviter de rencontrer son adversaire. Il échappera à des sanctions sportives ultérieures parce qu’il est difficile d’envisager « punir » une personne d’avoir trop mangé. Il sera accueilli en héros à son retour au pays et touchera la prime destinée aux athlètes iraniens auréolés d’or olympique.

Lors des JO de Moscou en 1980, 66 pays boycottent l’évènement, notamment sur demande des Etats Unis. A titre d’exemple, le célèbre boxeur Mohamed ALI avait été désigné par l’administration américaine pour inciter les gouvernements du Nigéria, de la Tanzanie et du Sénégal à se joindre au boycott. Il perdra finalement « ce combat » et rentrera groggy de sa mission.

L’histoire des JO est émaillée régulièrement d’incidents de ce type. Ces deux exemples de boycott mettent ainsi à mal une vision apolitique des Jeux. Les rivalités internationales trouvent des prolongements sur les terrains de sport et certaines personnalités ou organisations profitent ce cet événement pour faire passer des messages politiques. Le sport semble donc avoir définitivement échappé aux sportifs. N’est-il peut-être pas temps à ces derniers de se réapproprier courageusement ce champ et laisser les querelles de costards hors des terrains de jeux ?

COUPLES

Un peu de romantisme dans l’histoire de ces Jeux. Certains d’entre vous se souviennent sûrement du couple français Estelle MOSSELY et Tony YOKA lors des JO de 2016. Ils ont fait rêver beaucoup de monde en devenant tous les deux champions olympiques de boxe. Amour, gloire et beauté du sport.

Mais qui connaît cet autre couple de sportifs, également drapé d’or, lors des JO d’Helsinki de 1952. L’histoire est purement incroyable et mérite de s’y attarder un instant. La tchécoslovaque Dana ZATOPKOVA remporte l’or au javelot quelques minutes seulement après le triomphe de son mari Emil ZATOPEK au 5000m. Couronnés le même jour, ils ont aussi la particularité d’être nés à la même date, le 19 septembre 1922.Emil Zatopek, l’immense champion à la grimace légendaire, réalisera le triplé à ces mêmes JO (5000m, 10000m et marathon).

Sur un autre registre et sûrement un peu moins romanesque, le comité d’organisation des JO de Paris prévoit de distribuer près de 300000 préservatifs aux athlètes dans le village olympique, soit l’équivalent de 20 préservatifs par athlète ! Hope SOLO, ancienne star du football féminin américain, déclarait par exemple : « il y a beaucoup de sexe là-bas » en racontant son expérience lors des JO de Pékin de 2016. Lieu de rencontre, les villages olympiques permettent à des athlètes qui sont à leur apogée physique, de vivre pleinement et profondément cette aventure estivale. « Sport, Sex and Sun » : peut-être un slogan plus approprié pour qualifier ces jeux ?

DRAPEAU

Question posée à mes élèves de Terminale : « Que signifient les cinq couleurs du drapeau olympique ? ». Une main se lève : « Monsieur, chaque couleur représente un des continents. Le jaune pour l’Asie, le Noir pour l’Afrique… ».  Ses camarades opinent du chef. La charte olympique précise que « le symbole olympique exprime l’activité du Mouvement olympique et représente l’union des cinq continents et la rencontre des athlètes du monde entier aux Jeux Olympiques »(art. 8). On pourrait donc valider la réponse de notre élève mais il faudrait plutôt édulcorer cette vision poétique de cinq continents entrelacés. A l’origine, Pierre de COUBERTIN, en créant en 1913 les anneaux olympiques, sélectionne les 6 couleurs qu’on retrouve dans tous les drapeaux des pays participants : bleu, jaune, noir, vert et rouge sur un fond blanc. Les couleurs sont donc celles qui sont présentes au moins une fois sur l’ensemble des drapeaux des 28 pays (dont 20 européens) participants aux JO de Stockholm de 1912. Et qu’en est-il du drapeau paralympique ? Je pose la même question aux élèves… aucune main ne se lève (ou timidement). Moins connu, on ne retrouve que 4 couleurs : Bleu, rouge et vert sur fond blanc. Les anneaux sont remplacés par trois vagues qu’on appelle agitos (ce qui en latin signifie « je bouge »).

ESCRIME

Quels sont les sports où la France a remporté le plus de médailles lors des JO d’été ? Rares sont les élèves et les collègues capables de trouver le bon tiercé dans l’ordre : escrime, cyclisme en enfin judo. Ce classement est à nuancer puisque chacun de ces sports compte de nombreuses épreuves. Par exemple, l’escrime en compte 12 et le judo 15. Alors que d’autres sports, à l’instar du handball ou du football, n’en comptent que deux (épreuves féminine et masculine). Le Beach handball, le Beach soccer ou encore le futsal étant toujours boudés par les membres du CIO. Ainsi, sur le plan comptable, une médaille d’or lors d’une épreuve individuelle comme le judo(qui se résume souvent qu’à une seule éprouvante journée de compétition pour un compétiteur) équivaut à une médaille d’or d’une équipe d’handballeurs après plusieurs journées de compétition. Toujours dans cette logique de comparaison entre sports, le judo (tout comme la boxe, le taekwondo ou la lutte) fonctionne avec une logique de double médaille de bronze. Cette règle des quatre médailles offre donc à ces disciplines des chances supplémentaires de médaille. Le classement est également à nuancer en raison de l’apparition tardive de certaines activités dans la programmation. L’escrime est présente dès les 1ers JO alors que le tennis de table doit par exemple attendre 1988. Le judo, présent aux jeux que depuis 1964, en étant sur le podium, montre la qualité exceptionnelle du Judo français. Que nous apprennent donc toutes ces données ?Même si notre propos n’est pas de minimiser chaque médaille gagnée, il est donc toujours bon de nuancer n’importe quel chiffre.

FLAMME

Parmi les nombreux symboles des JO, la flamme est l’une des plus emblématique. Comment se déroule le cérémonial ? La torche est allumée 100 jours avant le démarrage des JO sur les ruines du temple d’Héra à Olympie, en Grèce. La cérémonie est jouée par des femmes en tenue de la Grèce antique et elles interprètent les prêtresses de la divinité Héra. Cette dernière, sœur et épouse de Zeus, est un des personnages majeurs de la religion grec antique. La flamme fait donc directement référence à un imaginaire mythologique et religieux.

La flamme est arrivée par bateau sur le territoire français le 8 mai et parcourt depuis de nombreux sites en France sous forme de relais courts (200 mètres en moyenne)entre différents participants. Ces relayeurs ont été sélectionnés souvent pour leur notoriété, leur engagement ou leur contribution à la vie locale. L’ultime relayeur est censé être révélé au dernier moment. D’après les règles du CIO, les personnalités politiques sous mandat ainsi que les personnalités religieuses ne devraient pas pouvoir porter le flambeau.

Cette transmission de relais, se voulant être un message de paix et d’amour entre les peuples, a cependant un certain coût. Chaque département, via son conseil départemental, a dû accepter de débourser près de 150 000 euros pour voir passer la flamme sur leur terre. Sans compter les frais pour la logistique et la sécurité, cette somme a fini par refroidir de nombreux départements. Chacun se fera sa propre opinion sur l’intérêt d’une telle dépense sur les fonds publics de la part des 64 collectivités territoriales participantes.

GENRE

Sûrement à l’image des pensées dominantes de son temps, Pierre de COUBERTIN, père fondateur des Jeux modernes, exprime toute sa réticence à conjuguer les Jeux au féminin. En 1912, il déclarera : «impratique, inintéressante, inesthétique, et nous ne craignons pas d’ajouter : incorrecte, telle serait à notre avis cette demi-Olympiade féminine ». Associée à une idée de frivolité ou de mœurs légères, la femme sportive ne répond pas à un certain idéal féminin d’époque. En 1928,il protestera encore : « Quant à la participation des femmes aux Jeux, j’y demeure hostile. C’est contre mon gré qu’elles ont été admises à un nombre grandissant d’épreuves ». Seulement 2% des athlètes présents en 1912, les femmes représenteront 9,6% des participants en 1928. A la veille des JO de 1936 à Berlin, COUBERTIN insistera : « le véritable héros olympique est, à mes yeux, l’adulte mâle individuel […]. Aux JO, [le rôle des femmes] devrait surtout [être], comme aux anciens tournois, de couronner les vainqueurs ».Les femmes finiront par le mettre définitivement KO puisque les jeux n’échapperont plus au phénomène grandissant du sport féminin. Le parcours n’est bien entendu pas linéaire (différences entre pays notamment) et on finira par assister pour la première fois dans le cadre de ces JO de 2024, à une parité parfaite femmes-hommes au niveau du nombre de participants. Sur les 10 500 athlètes prévus, 5250 seront des femmes. Le sport féminin semble donc avoir gagné totalement sa place. On assiste par ailleurs à une tendance croissante d’épreuves mixtes : aux JO de Paris, 22 épreuves mixtes seront organisées en athlétisme, natation, voile, judo, tir à l’arc, relais de triathlon, tennis de table et en tir. Serions-nous en train d’assister à un autre phénomène grandissant, celui où femmes et hommes concourent ensemble à des compétitions sportives d’envergure ?A suivre donc.

HANDICAP

Intéressons-nous aux Jeux paralympiques prévus à Paris du 28 août au 8 septembre 2024. Après la seconde Guerre Mondiale, Ludwig GUTTMANN, un médecin neurologue anglais, propose d’organiser un concours sportif pour ses patients blessés à la guerre. C’est donc en 1948, dans la ville de Stoke Mandeville, à 60 km de Londres que se déroulent les premiers « jeux mondiaux des chaises-roulantes et des amputés ». En réalité, cette première édition n’opposera que deux équipes de vétérans de la guerre à une seule et unique épreuve de tir à l’arc. On parlera au début des « Jeux Internationaux de Stoke Mandeville » avant de les renommer « Jeux Paralympiques » en 1984. Dans cette quête notamment de reconnaissance et de visibilité, la technologie semble être un allié majeur pour la pratique handisport en permettant d’augmenter les possibilités physiques des athlètes. D’abord en bois, puis successivement en mousse, cuivre, titane… l’exemple des prothèses de membre de plus en plus sophistiquées et légères offrent des possibilités inépuisables à ces « corps hybrides » (B. ANDRIEU, 2011). Quel impact sur l’avenir du sport grâce à ces innovations technologiques ?Est-il possible d’assister dans un futur proche à un bouleversement radical dans tous les records mondiaux par des sportifs équipés de prothèses bioniques ? Des sauts à plus de 10 mètres, des 100 mètres à moins de 9 secondes… Sur le plan visuel et spectaculaire, comment rivaliser avec ces prouesses artificielles ? Viendra donc un jour où les Jeux Paralympiques supplanteront certainement les JO. On fait un pari ?

IMAGES

Que seraient les jeux sans les images transmises en direct ? Un simple entre-soi entre sportifs et organisateurs ? Le premier direct radiophonique, mis en place pour le marathon des JO de Paris en 1924 constitue un des tournants pour permettre à chacun de vivre en direct les exploits de ces sportifs amateurs. L’armée française, en plaçant différents postes radios émetteurs tout au long du parcours de ce marathon, permet de suivre en temps réel ce marathon. Avant cela, le public n’avait aucune connaissance du scénario et des rebondissements de la course. Il fallait attendre l’arrivée pour découvrir le visage du vainqueur. Il était une fois… directement la fin (de la course).Un peu triste n’est-ce pas ?En 1964, c’est la première transmission en direct des JO dans le monde entier grâce à une liaison satellite. C’est un tournant décisif. Les sportifs s’invitent dans l’intimité de chaque foyer. Les ralentis, les angles multiples, les zooms… tout est décortiqué. Les caméras de plus en plus sophistiquées permettent de sublimer chaque geste, de suivre chaque émotion et d’accompagner chaque sportif. Assis dans son fauteuil ou allongé sur son lit, chacun peut donc consommer souvent moyennant un abonnement payant, ces gladiateurs des temps modernes.

La transmission en direct a aussi des risques. Lors de la cérémonie d’ouverture des JO de Séoul (1988) par exemple, le monde entier assiste au lâcher de 2400 colombes au moment de l’entrée du drapeau olympique. Certains de ces oiseaux restés au bord du vasque allumé à ce moment-là sont grillés sur le coup. Le régisseur, sensé sélectionner parmi les multiples caméras du stade ce que le téléspectateur mérite d’admirer et regarder, ayant sûrement manqué de reflexe à ce moment-là.

JEUNESSE

Parmi les multiples déclinaisons des JO, on trouve les jeux d’hiver, les jeux paralympiques mais aussi les JOJ, les JO de la jeunesse, rassemblement d’athlètes de 15 à 18 ans. Cet événement permet aux CIO d’expérimenter de nouveaux sports, de nouvelles épreuves ou de nouveaux concepts comme les équipes plurinationales. Ces JOJ permettent donc d’innover et influencent souvent l’organisation des futurs JO.

Quelques exemples d’innovations :

  • Les premiers relais mixtes en natation ont été testés lors des JOJ de Singapour en 2010. On retrouvera lors des JO de 2020 à Tokyo le tout premier relais mixte en natation (4x100m quatre nages).
  • Le programme des JOJ ouvre la porte à de nombreuses disciplines n’ayant pas encore trouvées leur place dans le cadre des JO classiques : Beach handball, futsal… D’autres ont pu être testées dans le cadre de ces JOJ avant de trouver leur place dans la programmation actuelle des JO : Breaking, escalade, rugby à 7, basketball 3×3…
  • En tennis de table ou au tennis, on assite à des équipes mixtes plurinationales, c’est-à-dire qu’un sportif d’un pays peut s’associer à un autre d’une autre délégation.
  • Lors des JOJ de Buenos Aires en 2018, on assiste à un concours entre 6 équipes représentant chacune un continent.
  • Les premiers JOJ d’été se sont déroulés en 2010 à Singapour. En 2026, ils se dérouleront à Dakar au Sénégal. Pour la première fois, un événement olympique pourra se dérouler sur le continent africain.

Véritable laboratoire d’innovation, il est donc toujours bon de garder un œil sur ces JOJ pour pouvoir anticiper les futures tendances à venir aux JO.

KANAKURI

Shizo KANAKURI peut être considéré comme le plus lent coureur de l’histoire du marathon. Son temps : 54 ans, 8 mois, 6 jours, 8heures, 32 minutes, 20 secondes et 3 dixièmes. En 1912, il est le premier asiatique de l’histoireà participer au marathon olympique. Les 64 participants de cette course sont tous des sportifs amateurs. Cet été à Stockholm, la chaleur est étouffante. Les 64 participants sont éprouvés et la moitié finira même par abandonner. Le portugais Francisco LAZARO, pourtant triple champion national de son pays dans cette discipline, s’écroule au 30è km et meurt… Le norvégien Ole OLSEN sera le dernier à franchir la lignée d’arrivée en 3h36 minutes. Malgré les recherches de la police et des organisateurs, le japonais est porté disparu. En 1912, on n’a pas encore les moyens radiophoniques ou télévisuels pour suivre en direct les athlètes. Ce n’est bien qu’un demi-siècle plus tard, qu’un journaliste suédois découvrira le fin mot de l’histoire. KANAKURI, épuisé autour des 27 km, est accueilli gentiment par un couple local pour lui permettre de se reposer un moment. Il se réveillera le lendemain. Honteux de s’être endormi, il repartira en catimini chez lui. 55 ans plus tard, en 1967, alors âgé de 76 ans, KANAKURI reviendra au stade olympique de Stockholm pour finir sa course devant une foule acquise à sa cause.

Voilà comment ce professeur de géographie à la retraite résumera son expérience olympique : « Ce fut un long voyage ».

LYON

Dans une réalité alternative, aurions-nous pu voir débarquer les JO à Lyon ? Ce n’est pas faute d’avoir essayé… trois fois, en vain : 1920, 1924 et 1968. Paris reste actuellement la seule ville française à avoir accueilli les JO d’été : trois fois en comptant ceux de 2024. Lille est l’autre unique ville française avec Lyon à avoir également tenté sa chance (Jeux de 2004).

Plusieurs villes prestigieuses ont connu la même déception : New York, Chicago, Buenos Aires, Madrid… Istanbul est un cas typique : la ville est recalée à chaque fois depuis sa première candidature pour les JO de 2000.  Los Angeles accueillera pour la troisième fois les Jeux en 2028 ; Brisbane en 2032. La capitale turque espère donc enfin pouvoir accueillir l’évènement en 2036. Mais plusieurs autres postulants comme le Qatar, la Hongrie ou encore l’Indonésie semblent partager le même désir. La concurrence est donc féroce et on peut imaginer que la France devra attendre beaucoup plus d’un siècle avant de pouvoir organiser à nouveau ce type d’événement. On peut se douter des pressions politiques et le poids des lobbies dans ce processus de sélection.

Un certain principe officieux existe aujourd’hui dans l’attribution de la ville organisatrice : l’alternance des continents devrait permettre d’éviter cette prédominance des villes européennes ou américaines comme hôtes privilégiés de ces Jeux.

A noter qu’après Grenoble en 1968 et Albertville en 1992, la France s’apprête à accueillir à nouveau les Jeux d’hiver en 2030.

MOLIERE

En 1972, l’anglais devient la seconde langue officielle du CIO. Le français étant la première. L’influence de nombreux français et francophones, à l’instar du baron Pierre de COUBERTIN ou encore de Jules RIME, expliquent le poids du français dans cette instance internationale dès les origines.

Aujourd’hui, sur le plan comptable, le français est la cinquième langue des plus parlées au monde après le mandarin, l’anglais, l’espagnol et l’arabe. Le continent africain, regroupe aujourd’hui près de 60% des francophones du monde. Et la proportion ne fera qu’augmenter en faveur de ce continent ces prochaines années. Selon l’observatoire internationale de la francophonie, l’Afrique pourrait compter plus de 90 % des jeunes francophones de 15-29 ans !

La langue française continue donc de jouir d’un prestige symbolique et réel grâce notamment à son histoire coloniale, à la vitalité de la population africaine, aux volontés politiques de promotion de la langue française à travers le monde, mais aussi à sa place dans des instances internationales comme le CIO. Les jeux constituent donc un bon baromètre pour mesurer le poids de cette langue sur le plan international. Même si, il serait sage de relativiser ce prestige de langue officielle, puisque lorsqu’on se retrouve dans le cœur de l’arène sportif, on se rend facilement compte que la plupart des officiels et des athlètes communiquent exclusivement en anglais entre eux. Rare de voir un Américain, un Chinois ou encore un Russe communiquer avec un sportif d’une autre nation ou même avec un Français en se servant de cette jolie langue de Molière.

NOEL

La charte olympique, véritable guide juridique mondiale en matière d’olympisme, est claire : « Il ne peut y avoir pour les concurrents aux Jeux Olympiques aucune limite d’âge autre que celles stipulées dans les règles de compétition d’une fédération internationale telles qu’approuvées par la commission exécutive du CIO » (chapitre V-42). Ainsi, il n’y a pas d’âge minimum décrété par le comité international olympique. Les derniers jeux olympiques de 2020 ont permis par exemple la participation d’une jeune pongiste syrienne de 12 ans ou encore celle de Nishiya MOMIJI, une skateboardeuse japonaise de 13 ans. Cette dernière remportera d’ailleurs la médaille d’or. Ce n’est donc pas un phénomène rare de voir de très jeunes athlètes participer aux JO.

Dans l’histoire moderne des Jeux, le plus jeune médaillé est un gymnaste grec de 10 ans à l’épreuve par équipe des barres parallèles aux JO d’Athènes de 1896. Etienne VANDERNOTTE, médaillé de Bronze à 12 ans de l’épreuve d’aviron en 1936,resteà ce jour le plus jeune représentant français sur un podium des JO.

 Et le plus âgé des médaillés aux Jeux ? Oscar SWAHN, qui après avoir récolté plusieurs médailles aux éditions précédentes, pour ses derniers Jeux, ce suédois de 72 ans récolte la médaille d’argent en 1920 à Anvers à une épreuve de tir (100m tir au cerf courant coup double). Ferdinand De SCHLATTER, finissant 3è à l’âge de 69 ans en voile lors des JO de Paris de 1900, est le français le plus âgé à avoir remporté une médaille.

Il n’y a donc pas d’âge pour participer… et gagner !

OWENS

Jesse OWENS fait sûrement partie des figures les plus emblématiques dans l’histoire des Jeux. Cet homme de l’Alabama, Etat du sud-est des Etats-Unis, remporte 4 médailles d’or lors des JO de Berlin en 1936. On voit en lui, un « camouflet au racisme » d’Hitler (l’Humanité du 7 août 1936). Jesse Owens devient le symbole pour une bonne partie de l’opinion occidentale pour mettre à mal les théories racistes du führer allemand. De retour dans son pays, il redécouvre malheureusement une réalité toujours aussi sombre.

Interrogé par des journalistes sur le refus supposé d’Hitler de lui serrer la main, voilà ce que Jesse Owens répond : « Hitler ne m’a pas snobé. C’est Roosevelt qui m’a snobé. Le président ne m’a même pas envoyé un télégramme ». Le président américain de l’époque, Franklin D. Roosevelt, en pleine campagne de réélection n’osera jamais féliciter ou inviter cet athlète noir à la maison blanche… Il faudra attendre longtemps. Très longtemps. 40 ans plus tard, en 1976, pour avoir enfin une reconnaissance présidentielle officielle.

Lors de son retour aux Etats-Unis, cet athlète de 22 ans, devra par exemple emprunter le monte-charge et surtout pas l’ascenseur interdit aux noirs d’un hôtel alors QU’UNE réception y était pourtant donnée en son honneur ! Nous sommes en effet dans une Amérique en pleine ségrégation où les lois racistes « Jim Crow » permettent d’interdire aux personnes de couleurs de se retrouver dans les espaces publics, les restaurants, les hôtels et de les priver de certains droits civiques. Le sort des minorités aux Etats-Unis est marqué par un racisme organisé et une violence quotidienne.

Lors d’une interview au New York Times de l’époque, Jesse Owens dénonce ainsi cette ségrégation : « je suis revenu dans mon pays natal et je ne pouvais pas monter à l’avant des bus. J’étais obligé de passer par la porte arrière. Je ne pouvais pas vivre là où je voulais ».

Victime de discrimination sociale et économique dans son propre pays, il y adonc quelque chose de terriblement ironique à voir en OWENS le symbole d’une supposée victoire contre le racisme en Allemagne.

PHRYGES

La première mascotte officielle des jeux d’été apparaît en Allemagne lors des JO de Munich de 1972 et fait depuis partie de ces différents folklores officiels des jeux. Souvent représentée par un animal local ou par une créature imaginaire, la mascotte permettrait de faire le pont entre la région hôte et la dimension universelle de ces jeux. Waldi, le teckel de Munich (1972), Amik, le castor de Montréal (1976), Misha, l’ours de Russie (1980), Sam, l’aigle américain (1984) ou encore Hodori, le tigre de Séoul (1988)sont quelques-unes de ces mascottes. On peut être souvent extrêmement surpris par le graphisme et le choix de certains designs. Je vous invite ainsi à (re)découvrir la mascotte d’Athènes de 2004 : Phévéos et Athéna. Mais bon, après tout, « des goûts et des couleurs, on ne discute pas ». Le comité olympique français a choisi les Phryges comme mascottes de ces JO de Paris. Les deux bonnets phrygiens font directement référence à la Révolution française et aux valeurs associées de liberté. Les différentes mascottes, sont donc souvent des personnages sympathiques, souriants et représentant l’identité visuelle des pays hôtes. Les mascottes sont usuelles dans l’univers des clubs sportifs. Mais pas seulement : on peut penser aux parcs à thèmes, aux entreprises, aux clubs de vacances ou tous autres produits publicitaires. Pour ces JO, on peut donc retrouver ces Phryges sous forme de figurines, affiches, peluches… contre une dizaine d’euros. C’est aussi et surtout donc un produit commercial.

https://olympics.com/fr/olympic-games/paris-2024/mascot

QUATRE

En 1906, le prince Constantin de Grèce souhaite à nouveau organiser les Olympiades sur ces terres helléniques. 10 ans après les premiers jeux de l’ère moderne à Athènes (1896), 578 athlètes représentant 19 pays participent à ces jeux baptisés « jeux de la décennie ». Considérés comme un succès en matière d’organisation et d’ambiance, ces jeux posent cependant un énorme problème. Situés entre les deux événements officiels, JO de1904 à Saint-Louis et ceux de 1908 à Londres, cet événement ne respecte pas la fréquence quadriennale entre deux jeux d’été. Il faudra attendre 1949 pour qu’une commission officielle des CIO invalident ces jeux en les qualifiant plutôt de jeux intercalaires ou intérimaires. 4 ans, c’est très long, n’est-ce pas ? Cette périodicité, héritage des jeux antiques, est-elle encore pertinente ? Quand on consulte la liste d’attente des pays souhaitant organiser les jeux d’été et le succès médiatique de ce type d’événement, combien de temps devront nous attendre avant de voir ce rythme remis en question ? Certes, il y a une alternance jeux d’hiver et d’été, mais en quoi un événement organisé en hiver peut réellement gêner celui se déroulant en juillet-août. Et quelle place réelle des pays se trouvant souvent dans l’hémisphère sud à ces jeux d’hiver ? Mais ça c’est un autre débat.

RECORDS

Ce court article pourrait parler de différents records sportifs à l’instar du sportif le plus titré des Jeux. Avec 28 médailles, dont 23 en or, Michael Phelps surclasse tous les autres concurrents. Mais on va surtout s’intéresser ici à d’autres chiffres dans le domaine de l’audiovisuel. Les JO d’été sont l’événement le plus regardé dans le monde. Paris 2024 rassemblera plus de 4milliards de téléspectateurs. Paris sera la capitale mondiale pour les médias cet été. Durant un mois, ces jeux permettront d’organiser l’équivalent de 32 championnats du monde au même endroit. Véritable défi logistique et financier, le gigantisme de ce type d’événement sportif ne laisse pas indifférent. Les critiques et les appels à ne pas suivre ces jeux sont donc monnaie courante face aux « excès » constatés. L’enquête du 13 avril 2024 menée par l’entreprise de sondage IPSOS pour le journal économique et financier La Tribune montre ainsi que 35% des français se sentent indifférents à cet événement. On comptera de toute façon les points à la fin. Combien serons-nous devant nos écrans ? Un nouveau record d’audience à venir ?

SPORTS

Tandem, tir au pigeon, duel au pistolet, monter de corde, sauts sans élan, nage sous l’eau, polo, golf…. La liste des disciplines qui ont été abandonnées au fil des Olympiades est plutôt longue. Pouvons-nous imaginer aujourd’hui, un lâcher de pigeon avec un tireur scrutant le ciel pour les abattre un par un sous les « hourras » de spectateurs ? Et à la fin, une remise de médaille et les hommages de la nation pour le meilleur tueur d’oiseau. Choquant non ? Autre temps, autres mœurs. Il est possible d’ailleurs d’imaginer que d’ici un siècle, certaines pratiques d’aujourd’hui feront écarquiller les yeux desfutures générations.

Comment sont d’ailleurs choisis les différents sports lors de ces jeux d’été ? Il y en a 32 retenus. Le CIO opère une sélection à partir de multiples critères notamment l’universalité du sport. Pour ces jeux de Paris apparaît pour la première fois le breakdance et le retrait du karaté. On retrouvera encore la boxe malgré les multiples polémiques au niveau de son impartialité. Il ne serait d’ailleurs pas étonnant de voir cette discipline disparaitre de la liste officielle. Quand pourrons nous voir des activités comme la danse, la pétanque, le bowling ou encore le MMA débarquer dans la programmation ?

Mais d’ici les JO de Los Angeles en 2028, attendons-nous plutôt à voir débarquer le cricket, le baseball-softball, le squash, le flag football ou encore la crosse. Certaines de ces pratiques sont encore très méconnues sur notre territoire.

A ce titre, un des intérêts de ces JO est d’offrir une visibilité à certaines activités habituellement moins exposées médiatiquement. C’est pour beaucoup de téléspectateurs le seul moment parfois d’assister à une épreuve de cyclisme BMX, d’hockey sur gazon ou encore de waterpolo.

TRICHE

Lors des Jeux paralympiques de Sydney en 2000, l’équipe masculine d’Espagne de basket déficiente intellectuelle affronte en finale l’équipe de Russie. Elle remporte le match et s’adjuge ainsi l’or olympique. Après une enquête minutieuse, un journaliste espagnol finit par dévoiler le poteau rose. Sur les 12 basketteurs de l’équipe, 10 n’ont aucun handicap. Pire : la fédération espagnole de sport pour les déficients intellectuels était au courant de cette fraude. Cette triche organisée est terrible puisqu’elle entache pour un long temps le combat des athlètes ayant une déficience cognitive pour intégrer pleinement les jeux paralympiques. Cette histoire fait partie des multiples autres scandales qu’on peut retrouver dans la littérature des Olympiades. Que ce soit le dopage, les soupçons de corruption de juges ou d’arbitres(on se souviendra par exemple de l’écartement de l’intégralité des 36 juges et arbitres de la boxe pour enquête lors des JO de Rio de 2016) ou encore les simulations plus ou moins grossières dans certains sports comme le football, on pourrait facilement remplir tout cet abécédaire d’anecdotes de triche.

Un autre phénomène à prendre très au sérieux : les paris sportifs. Témoin de discussions d’adolescents autour de ces jeux d’argent, il serait intéressant de mesurer le poids de ces pratiques addictives parmi nos lycéens et étudiants. On risque d’être surpris voir désabusé. De manière plus large, quelle crédibilité accorder réellement à certains résultats quand on voit les sommes mises en jeu ? La pression sur les sportifs est terrible et la tentation de truquer un match peut être alléchante. Se coucher en boxe, ne pas gagner son match au tennis… Perdre peut rapporter gros.  Je vous renvoie par exemple à une affaire qui a fait beaucoup de bruit dans le handball français en 2012.

UNIVERSALISME

Lors des JO de Stockholmde 1912, les 5 continents sont représentés pour la première fois : 20 nations européennes, 3 américaines (USA, Canada, Chili), une océanienne (l’Australasie :  nom donné à l’équipe regroupant les sportifs australiens et néo-zélandais en 1908 et 1912), deux asiatiques (le Japon et l’Empire Ottoman) et deux africaines (Afrique du Sud et Egypte). Dans un contexte d’une planète à moitié colonisée, l’universalisme revendiquée par le CIO commence-t-elledonc à prendre enfin forme ?Le souhait de voir en l’olympisme une valeur partagée par toutes et tous quelles que soient les sociétés, les cultures ou les nations constituent un des vœux – piliers pour les différents législateurs et décideurs de l’époque. En devenant un événement mondial, ces jeux n’échappent cependant pas aux enjeux géopolitiques et économiques. Boycotts, courses aux médailles, appels à l’exclusion de la Russie ou d’Israël par exemple aux Jeux de Paris 2024… On est donc bien loin d’un événement apolitique. Ces jeux voient ce rêve de démocratie mondiale être mis à mal par les lobbys et les pressions de nations plus ou moins dominantes dans l’échiquier mondial. A l’instar de 5 pays qui ont un droit de véto permanent (à vie ?) à l’ONU, leur permettant de s’opposer seul contre tous les autres pays du monde sur un projet de résolution si nécessaire, cette vision d’une démocratie mondiale est impossible et devient intenable. L’universalisme semble finalement être un idéal naïf. Un simple vœu pieux ? C’est une partie perdue d’avance. Les JO, en étant terriblement politisés, n’échappent donc pas aux incohérences politiques internationales. On peut donc être pessimiste pour la suite. A moins de rendre le sport aux sportifs et de sortir de cet engrenage. Mais bon, j’arrête ici les contes des fées

VATICAN

Le Vatican est actuellement le seul état membre de l’ONU à n’avoir jamais participé aux JO. Qui sait ? Il n’est pas impossible de voir ce petit état de la taille équivalente à 75 terrains de football réunisse doter d’un comité national olympique. Verrons-nous une délégation d’athlètes défiler prochainement sous ce drapeau lors des jeux de 2028 ou 2032 ?

On peut noter en revanche la participation de la Palestine à ces Jeux de Paris malgré son statut ambigu à l’ONU. Certes reconnu officiellement par 145 pays dans le monde(sur les 193 Etats membres de l’ONU), ce pays aux frontières « peau de chagrin »n’est toujours pas admis à l’ONU. Les vétos successifs des Etats-Unis (le dernier datant par exemple du 18 avril 2024)illustrent ce paradoxe décrit à l’article « Universalisme ».

Néanmoins, malgré la destruction de toutes les infrastructures sportives et la mort de nombreux athlètes durant ces neuf derniers mois, on aurait à priori des athlètes palestiniens à ces Jeux de Paris. S’ils arrivent bien sûr vivants d’ici-là.

Une anecdote plutôt amusante pour chasser ces dernières lignes moroses : lors des JO d’Helsinki de 1952, le luxembourgeois Josy BARTHEL remporte à la surprise générale la médaille d’or pour son pays à l’épreuve du 1500 m d’athlétisme. La fanfare, prise au dépourvu, improvise un son qui n’est pas celui de ce pays. Qui peut situer sur une carte le Luxembourg ? Le Lichtenstein ? Nauru ? Le Turkménistan ?

Les JO c’est donc aussi la possibilité à de nombreux pays d’arrêter de jouer au jeu « Où est Charlie » et donc de gagner en visibilité.

WALASIEWICS

L’histoire de Stanislaswa WALASIEWICS(alias Stella WALSH) est plutôt surprenante.Cette athlète polonaise remporte la médaille d’or du 100 m aux JO de Los Angeles (1932) en égalant le record du monde. Elle finira 2è aux JO de Berlin (1936). Détentrice de multiples records et titres sportifs, elle sera naturalisée américaine en 1947.

Le 4 décembre 1980, lors d’un braquage à Cleveland, elle est tuée par arme à feu. Comme c’est une cause non naturelle, l’Etat de l’Ohio impose une autopsie. Les examens révèleront un pénis et des testicules non fonctionnelles, ainsi que l’absence d’organes féminins. Également la présence de chromosomes masculins et féminins. Les différents titres ne lui seront cependant pas enlevés. Les images sur le net méritent d’être consultées pour se forger une opinion plus précise.

Cette histoire nous permet ici d’interroger la place des athlètes transgenres dans le sport. Ils ne seront pas autorisés à participer aux JO de Paris. A noter qu’on ne doit plus utiliser le concept de « transsexuel » puisque ce terme était initialement utilisé en médecine pour signifier une personne atteinte d’une maladie mentale. L’OMS a ainsi retiré en 2019 la transidentité de la liste des pathologies. La pratique des athlètes transgenres interroge fortement les différentes fédérations sportives notamment sur leur place dans les catégories féminines. Ces questions sont également partagées par différents professeurs d’EPS notamment pour l’organisation des vestiaires ou encore à propos des barèmes d’évaluation. Le débat sur l’inclusion des athlètes transgenres est loin d’être serein et ne fait que commencer. La Fédération Française de Rugby est devenue la première fédération française à autoriser la compétition aux athlètes transgenres dans l’élite féminine. Quelle sera la suite ? En autorisant les personnes transgenres à concourir dans les compétitions féminines, ne risque-t-on pas de fausser l’équité sportive au détriment de la femme dite cisgenre ?

XENOPHOBIE

Lors de JO de Saint-Louis aux Etats-Unis (1904), les organisateurs ont réservé deux jours aux « journées anthropologiques » : le directeur de ces Jeux, James Edward SULLIVAN (qui sera par ailleurs curieusement introduit au Temple de la renommée de l’athlétisme des Etats-Unis en 1977) souhaite montrer la supériorité athlétique de la « race blanche » sur les « sous hommes ». Ces « primitifs », exposés au public à l’Exposition universelle de 1904de Saint-Louis sont des indiens (crow, sioux, navajo, chippewa et pawnee), des syriens, des zoulous, des pygmées d’Afrique ou encore des tribus provenant des Philippines. Ils sont forcés de s’affronter dans différentes épreuves inter-peuples. Les épreuves de natation ont été supprimées puisque les organisateurs se sont rendu compte que la plupart ne savaient pas nager. Les explications des différentes épreuves en langue anglaise ont donné des scènes cocasses puisque les participants ne comprenaient pas ce qu’il fallait faire. Le fait de réunir plusieurs épreuves en deux jours a provoqué l’annulation de finales faute de participants puisque extenués ou blessés. Globalement, les résultats sont extrêmement décevants puisque les « indigènes » n’étaient pas préparés à ces jeux de la honte. Le célèbre chef apache GERONIMO, alors âgé de 75 ans, avait été forcé de s’asseoir dans les tribunes pour assister à ce simulacre de jeux.

Loin d’être un cas à part, ce genre d’exposition « d’indigènes » au public blanc était une pratique assez courante. Prenons l’exemple de l’exposition coloniale internationale de Paris en 1931. L’installation d’un « village kanak » au Jardin d’Acclimatation dans le bois de Boulogne a mis en scène des kanaks à qui on avait ordonné de jouer le rôle de cannibales. Plusieurs d’entre eux sont morts de maladies, de mauvais traitements et d’humiliation. Autre temps, autres mœurs ? Les discours de COUBERTIN (« les races sont de valeur différente et à la race blanche, d’essence supérieure, toutes les autres doivent faire allégeance ») à l’image de ceux par exemple souvent oubliés de jules FERRY, célébré pour son école primaire obligatoire, laïc et gratuite (« les races supérieurs … ont le devoir de civiliser les races inférieures ») viennent assombrir aujourd’hui leur œuvre. Autre temps, autres mœurs ? Certains discours idéologiques aujourd’hui pourraient nous faire cependant croire que rien n’a changé. Mais c’est peut-être noircir ici un peu trop le tableau… ?

YIFTER

Certaines histoires, quand on les découvre, on a du mal à croire si elles sont vraies ou romancées. Celle du coureur éthiopien Miruts YIFTER fait partie de celles-là et pourrait avoir comme titre « l’or ou la prison ». Lors des JO de Munich (1972), il finit troisième sur le 10000m. Qualifié également pour la finale du 5000 m, il arrive en retard pour le début de la course. Il critique ses coachs nationaux de l’avoir retenu trop longuement sur le terrain d’échauffement. A son retour au pays, le gouvernement de l’empereur éthiopien, Hailé Sélassié, le condamne à 3 mois de prison pour « trahison »à cause de ses critiques publiques. Certaines versions, plus ou moins fantasmées, trouvent dans son emprisonnement son échec de ne pas être revenu avec l’or olympique.

Il a la chance de se racheter quatre ans plus tard aux JO de Montréal (1976) mais son pays, comme de nombreux autres pays africains, boycottent l’événement. Il devra attendre 1980 et les JO de Moscou pour finalement se rattraper et remporter deux médailles d’or sur les épreuves du 5000 et 10000m. Quatre années plus tard, l’Ethiopie boycotte à nouveau les jeux, ceux de Los Angeles (1984) et empêche Miruts YIFTER de briller à nouveau.

Deux boycotts dans une vie sportive, c’est l’équivalent de nombreuses années gâchées dans une carrière sportive de haut niveau relativement courte. Quel dommage. Ce sportif dominateur dans les courses de fond aurait pu laisser une trace inoubliable dans l’histoire des Jeux mais il a été malheureusement enfermé dans les geôles d’intrigues politiques le dépassant.

ZEA

La baie circulaire de Zéa du Pirée est un endroit agréable pour s’installer boire un verre en terrasse et admirer le paysage. Lors des premiers JO d’Athènes en 1896, ce lieu offre ses eaux pour les épreuves de natation, notamment l’épreuve du 100 m nage libre. 13 nageurs représentant 4 nations concourent à cette épreuve. On est le 11 avril 1896, le thermomètre affiche 18°C. Les nageurs ont froids. L’eau est glaciale : 13 °C ! Le parcours est balisé par des citrouilles évidées qui flottent à la surface. Le tracé, loin d’être rectiligne, est mouvant. Le hongrois Alfred HAJOS, habillé en short, débardeur et recouvert entièrement de plusieurs couches de graisse pour lutter contre le froid, remporte ce premier 100m de l’histoire des Jeux en 1 min 22 secondes (bien loin des 44 secondes 84, record du 100m nage libre actuel sur bassin de 25 m)

Lors des JO de Paris de 1900, c’est au tour de la Seine d’accueillir les épreuves de natation. Il faudra attendre les JO de Londres de 1908 pour voir les premières épreuves de natation dans une piscine. Le bassin mesurait 100m de long et 17m de large. Aujourd’hui, les bassins dits olympiques mesurent 50 m de long sur 21 m de large au minimum. L’eau étant chauffée à 25°C.

Et pour l’anecdote, si vous vous rendez un jour à la piscine nationale de Budapest en Hongrie, sachez que ce bâtiment porte le nom d’Alfred HAJOS.

L’histoire de ces Jeux est définitivement passionnante.

ET APRES LA LETTRE Z ?

Pour conclure, il y aurait tant de choses à rajouter concernant ces jeux de Paris. Cet abécédaire est le fruit d’une réflexion personnelle et n’engage donc que son auteur. Je constate un nombre assez significatif de collègues ressentant un réel malaise à propos de ces olympiades. La communication officielle prône pourtant des jeux « citoyens », « festifs » ou encore « écologiques ». De simples éléments de langages ? On devine en tout cas un certain décalage dans l’appréhension de cet événement selon les protagonistes. Loin de n’être qu’un simple événement sportif, les champs politique et économique ont largement la mainmise sur le sport et les sportifs. Chacun se forgera sa propre opinion. Il semble bien loin ce caractère désintéressé du sport tant prôné par les idéalistes de ces Jeux. Cet abécédaire a eu l’ambition d’offrir un double regard : d’une part critique puisqu’une attitude passive est interdite pour nous face à certains événements ; mais aussi de curiosité : l’histoire des jeux, c’est aussi une histoire d’hommes et de femmes de leurs temps. Et donc de nous-mêmes.

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