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Ni un cri du cœur, ni un coup de gueule !

Snalc
© Snalc

Ni un cri du cœur, ni un coup de gueule !

Jean-Pierre Gavrilovic
A l’heure où l’on vient de boucler un cycle complet post-réforme du lycée, pourquoi ne pas dresser un bilan… qui ne se voudra cependant pas exhaustif.

Mon témoignage n’en sera qu’un parmi d’autres ; il aura au moins le mérite de ne pas être déconnecté des réalités rencontrées par l’ensemble de nos collègues.

A de nombreuses reprises déjà, nous avons soulevé le problème du démantèlement inacceptable des filières technologiques, avec son lot d’aberrations pédagogiques et de sacrifices de personnels ; on ne reparlera pas du sort dramatique réservé à nos collègues de STI, comme nous le rappelle d’ailleurs la triste nouvelle venue de Marseille lors de la dernière rentrée scolaire.

Les filières technologiques ont souffert, certes, mais les filières générales n’ont pas été épargnées non plus par l’apparition de nouvelles doctrines pédagogiques fumeuses. Nous sommes tous victimes des fameuses nouvelles lubies, telle que la contextualisation par exemple : là, on demande aux enseignants de raconter une belle histoire, mais en aucun cas d’enseigner une discipline avec la rigueur que cela nécessite. L’exigence ayant été rayée de notre vocabulaire, il a fallu par la suite s’attaquer aux modes d’évaluation traditionnelle afin de masquer cette imposture.

Eh oui, à force d’observer l’élévation de la température de notre éducation malade, on ne trouve rien d’autre comme solution que de s’attaquer au thermomètre !! Dans ce but, nous commençons tous à plier sous ces fameuses grilles de compétence qui jouent avec efficacité leur rôle de cache- misère.

Alors, non seulement nous devons faire face à de nouvelles méthodes que nous rejetons massivement, mais en plus cela représente des charges de travail supplémentaires.

Dans le même temps, nous subissons de plein fouet une politique d’Austérité avec un A majuscule. Je vous rappelle que d’une part le point d’indice est gelé depuis juillet 2010 mais d’autre part, avec l’augmentation des cotisations sociales, nous subissons, et ceci est une première historique, une baisse de notre salaire net cette année !!
Avec l’Education nationale nous découvrons le « TRAVAILLER PLUS POUR GAGNER MOINS !! »

Et ce n’est pas fini… Effectivement, avec le projet numérique, nous allons nous retrouver être des producteurs d’activités pédagogiques accessibles au plus grand nombre – production qui entre parenthèses est déjà demandée lors de vos inspections puisqu’on vous demande de fournir l’ensemble de vos activités des années précédentes, mais je reviendrai sur ce sujet dans une autre tribune -.

Il est temps de monter le ton et de remettre le savoir sur le devant de la scène. Etant pourtant un « laïcard » convaincu, j’oserais dire ici remettre l’église au centre du village…

En ayant depuis de nombreuses années privilégié la forme sur le fond, le paraître sur la substance, le rayonnement externe (participation aux GRF, etc.) sur le rayonnement interne (investissement auprès des élèves), notre système est en train de créer une cohorte d’enseignants désabusés, démobilisés, écœurés !!

Combien de fois, dans mes missions de responsable syndical, ai-je croisé des collègues voulant quitter le navire ? De trop nombreuses fois, mes chers collègues. Combien de fois me dit-on : « Il me reste au moins la reconnaissance de mes élèves !! » Chers collègues, effacez le terme au moins car l’essentiel est, a toujours été et restera les ÉLÈVES !!

Alors que les réformes sont initiées par des personnes vivant avec des élèves virtuels, il est plus que temps de faire confiance à ceux qui se dévouent dans leur quotidien auprès d’élèves qui eux sont bien réels…

Il est temps que le Ministère arrête de prêter l’oreille à des pédagogues, sociologues ou docteurs ès sciences de l’Education de tout bord et vienne sonder ses petits soldats qui tous les jours sont sur le terrain, à devoir réparer les dégâts produits par les différentes politiques pédagogiques qui se suivent…

Le bilan que je viens de dresser aura au moins le mérite de ne pas remonter au Ministère après le passage habituel à travers les filtres des IPR qui, comme tout bon filtre à eau, génère un adoucissement maximal. Il est toujours étonnant de constater la verticalité de notre système éducatif : on impose des programmes et des réformes sans conciliabule avec la base et l’évaluation de ceux-ci sera effectuée par les mêmes personnes qui les ont imposés… Eh oui, on n’est jamais aussi bien défendu que par soi-même !!!

Cette tribune ne sera finalement ni un cri du cœur ni un coup de gueule, mais un signal d’alarme adressé à notre institution dans laquelle nos collègues veulent continuer de s’investir tout en recevant la considération qu’ils méritent largement. Il est temps que le bon sens soit le principe fondateur d’un nouveau système éducatif.

Jean-Pierre Gavrilovic
Président du SNALC de Strasbourg

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